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Figures d’Eglise 3 - Paul Bony

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Pour nous accompagner pendant le Temps pascal, le Père Paul Bony nous offre des « Figures d’Église » : une invitation à relire les Actes des Apôtres.

« Que vient faire ce boiteux dans l’Église naissante ? » (Actes 3)

Pour lire le texte : https://www.aelf.org/bible/Ac/3

Pourquoi Luc a-t-il accordé tant d’importance à ce fait divers aux origines de l’Église de Jérusalem, aussitôt après le grand récit de la Pentecôte, ponctué par le discours inaugural de Pierre sur le Christ ressuscité et par la description de la première communauté qui met tout en partage ? Cela au moins était intéressant. N’avait-il rien d’autre à raconter de plus significatif ? Mais c’est justement de ce côté-là qu’il faut chercher : du côté du signe qui est donné.

Le mendiant de la Belle Porte n’était pas seulement un mendiant ; il était boiteux, et boiteux de naissance. Et son handicap n’était pas seulement physique, mais aussi social et religieux. Un boiteux est exclu du service du Temple (Lévitique 21, 18) en raison de son imperfection physique ; au temps de Jésus, il est exclu même de l’accès au Temple ; il reste « à la porte ». Cela, sur la base d’un dicton proverbial attribué à David : « Aveugles et boiteux n’entreront pas dans la Maison » (c’est-à-dire la maison de Dieu, le Temple, 2 Samuel 5, 8). Selon l’évangile de Matthieu, Jésus s’était laissé approcher par des aveugles et des boiteux dans le Temple, il les avait guéris et ils étaient entrés dans le Temple avec lui (Matthieu 21, 14). Les apôtres reprennent et continuent ce que Jésus faisait au cours de son ministère, quand il réintégrait les exclus (publicains et pécheurs publics, lépreux, prostituées, marginaux de toute sorte) ; se rappeler naturellement la guérison du paralysé par Jésus en Luc 5, 17-26. Par cette guérison, ce boiteux retrouve sa place pleine et entière dans le peuple de Dieu ; il participe à la louange de Dieu. Ce sera une préoccupation majeure de Luc tout au long du récit des Actes de montrer que les apôtres n’ont rien de mieux à faire que de reprendre à leur compte le ministère de Jésus : ministère de guérison et de pardon.

Il y a aussi la manière dont Pierre et Jean interviennent. Ils sont attentifs. Pierre fixe les yeux sur ce mendiant et il lui dit : « Regarde-nous. » Regarde notre regard. Attends quelque chose de nous ; pas nécessairement ce que tu attendais quand tu nous as vu entrer… Je n’ai ni or ni argent… Le récit campe quelqu’un qui est mis en demeure de recevoir ce qu’il n’attendait même pas. Ainsi en est-il de la réception inouïe du salut de Dieu en Jésus-Christ, qui est symbolisé par ce : « Au nom de Jésus-Christ le Nazôréen, lève-toi et marche. » C’est une résurrection. Il bondit et se met à louer Dieu, lui qui était jusque-là exclu de prendre part au culte.

Si nous allons jusqu’au bout du récit, nous nous apercevons qu’il va loin. C’est tout le peuple de Dieu qui est mis en question. Sans bien se rendre compte de ce qu’il faisait : il a tué le Pionnier de la Vie, car c’est ainsi, après coup, que se révèle à lui « Jésus le Nazôréen » quand Pierre rend compte de ce qui est arrivé. La guérison d’un paralytique s’accompagne dans les récits évangéliques d’un pardon, dont elle est le signe (Luc 5, 20). Où est le pardon ici ? Il est offert à ce peuple témoin de la guérison de l’un des siens : « Convertissez-vous donc et revenez à Dieu pour que vos péchés soient effacés… C’est pour vous d’abord que Dieu a fait se lever son Serviteur, et il l’a envoyé vous bénir, en détournant chacun de vous de ses actions mauvaises » (Actes 3, 26). C’est d’abord lui que Dieu a fait se lever, pour que Pierre puisse dire au paralysé : « Lève-toi et marche », et au peuple : « Convertissez-vous. »

Le pape François aime dire que l’Église est un hôpital de campagne. N’est-ce pas ainsi qu’elle a commencé ? Une guérison devient le signe de la bénédiction que Dieu destine à toute la descendance d’Abraham. Encore faut-il que Pierre et Jean aient été là pour « voir » cet infirme, et que leur foi dans le Christ ressuscité leur ait permis d’agir en son Nom. Ce n’est pas la foi du paralysé qui joue ici, mais celle de Pierre. Beaucoup de pauvres et de marginaux sont encore aujourd’hui « à la porte ». L’Église commence là où la foi rencontre la misère du monde pour une parole de résurrection.

Paul Bony

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